Loraine - vivre encore à fond cette vie congolaise

Lorsque Manon, Magalie et moi sommes arrivées, la saison des pluies tardait à débuter. Nous avons découvert des paysages ocre. Des terres brûlées par le soleil et séchées par la chaleur. Au fil de notre séjour, la végétation a changé, elle est devenue verdoyante. Sous nos yeux de semaines en semaines, elle s’est développée pour enfin être luxuriante. Maintenant, avec la saison sèche qui s’installe, je vois ces paysages changés, le jaune commence à dominer. Lorsque je quitterai, comme à notre arrivée, les paysages seront à nouveau ocre. J’ai pu également goûter aux différents fruits que m’offrait la période. Au début, les papayes, mangues puis ananas, avocats, safous, mangoustans, poilus, fruits de la passion, arachides, maintenant des oranges juteuses et dans quelques semaines les mandarines. Je ne pourrai juste pas profiter des premières mangues. Un cycle va se terminer et la boucle se boucler. Et oui, désormais même s’il y a encore deux mois, le compte à rebours du départ a commencé.

Par curiosité, j’ai relu un document que chacune de nous avions écrit avant notre départ pour décrire nos attentes que nous avions de ce voyage. Mon texte m’a fait sourire. En le lisant, je remarque l’évolution qui s’est faite durant ces sept derniers mois. Sept mois et pourtant j’ai l’impression qu’il n’y a pas si longtemps qu’on foulait pour la première fois le sol congolais. La notion du temps est bien différente qu’en Suisse dans notre petit train-train quotidien. Je ne dis pas que j’ai eu l’impression que tout a passé vite, je mentirais. Il y a eu des périodes, des semaines, qui m’ont paru longues ou j’aurais bien voulu faire un petit saut en Suisse et d’autres sont passées comme un clin d’œil.

Durant ces sept mois, j’ai eu l’impression tout d’abord de me découvrir et puis de me perdre. En premier lieu le changement, un milieu inconnu, l’éloignement avec ma famille et mes amis m’a fait voir ou m’a ramenée à la personne que je suis et pas celle que j’aimerais des fois en Suisse être. Cela m’a aidée, je pense à mieux apprivoiser les parties de moi que j’aime moins. Puis quand ici tout s’est bien mis en place, c’est bien installé que je profitais de ce nouvel épanouissement, le doute s’est installé. Est-ce que ce que je fais en Suisse, mes choix, mon mode de vie me conviennent réellement,  est-ce que c’est vraiment ceci que je veux pour moi… Voilà peut-être en m’acceptant mieux en enlevant certaines choses qui comblaient mes failles, le questionnement s’y est engouffré. C’est drôle en venant ici, je pensais que j’affirmerais mes choix, que mon avenir me paraîtrait plus clair, mais le contraire s’est produit.

Durant mon temps ici, j’ai découvert le sens vrai d’une communauté, de faire partie d’un groupe et des relations, des sentiments qui en découle. Je peux mettre plus de vécu derrière la signification du mot « ensemble ». Et paradoxalement, j’ai pu me réaliser, m’épanouir par moi-même, c’est-à-dire ne pas toujours attendre l’écho positif et la gratification des autres pour ce que l’ont fait ou ce que l’on est. Grâce au regard un peu spécial et en l’espérance que certaines personnes portent sur moi ici, j’y arrive plus facilement et me sens plus forte.

Jusqu’ici j’ai vécu de beaux moments et forts en émotions, en expériences. Ces moments, ces personnes resteront avec moi et leurs souvenirs gravés. J’ai encore de belles choses qui m’attendent pour ces deux derniers mois. Des moments, des jours à profiter, à croquer à pleines dents sans réserve et sans peur. Je vais découvrir de nouveaux horizons en traversant le diocèse dans le cadre des actions de Caritas. Une dizaine de jours de retraite avec les Bilenge ya Mwinda (le groupe de jeunes à la paroisse dont je fais partie) sont planifiés et qui promettent d’être fort en partages, surprises, rires et peut-être pleurs puisqu’ils se termineront le dimanche avant mon départ. Malgré cette petite ombre de la séparation qui assombrit quelques fois certains moments, j’essaie d’avancer sereinement et heureuse profitant de ces instants magiques en restant dans cette bulle qu’est ma vie ici en laissant en dehors de celle-ci les tracasseries liées à la réalité Suisse qui me parviennent. Pour ces deux derniers mois, mon seul mot d’ordre sera : vivre encore à fond cette vie congolaise.

Comments

[Lise]

Profite Loraine, ne pense pas à ce qui peut ou va se passer en Suisse, tu n'y es pas encore alors garde ton mot d'ordre bien près de toi pour ne louper aucun derniers moments de ton séjour! <3